"no control"
ft. freddie ★ crédit@tumblr.

C'est bizarre, cette situation avec Freddie, déjà parce que Freddie en elle-même n'a rien à foutre dans sa vie. Elle a débarqué un jour avec Diana, l'une de ses clientes régulières avec qui il a sympathisé au fil des années et des tatouages. Il n'a pas posé de question et c'est pas dans ses habitudes mais à l'époque elle affichait l'air de celle qui ne répondra pas. Il n'a même pas trop insisté sur le tatouage qu'elle voulait tant elle avait l'air décidé. Elle s'est pointée dans son salon avec une feuille et six mots délicatement tracés sur le papier, elle a exigé qu'il tatoue ça sur sa nuque. Exigé, ouais, en le regardant de haut et sans même un sourire. Il aurait pu l'envoyer chier, il aurait dû mais au lieu de ça, il a hoché la tête en souriant. Des femmes comme elle, Jamie n'en croise pas tous les jours. Elle l'a impressionné, au début en tout cas, parce qu'après la dame de fer a laissé place à une fille un peu plus fragile. La première fois surtout, quand elle s'est répandue en excuses quand elle a réalisé ce qu'ils allaient faire. Elle a marmonné des trucs à propos de l'indépendance, du respect, mais il a pas écouté. Il l'a embrassée et elle s'est tue, momentanément du moins parce qu'elle l'a engueulé un peu plus tard pour l'avoir interrompue de cette manière. Elle l'a traité de macho, lui a mis une claque derrière la tête et elle a quitté son lit sans même se soucier de se couvrir pour aller chercher plusieurs bouquins dans son bureau. Elle lui en a balancé trois en lui ordonnant de les lire, lui a résumé les autres. Et c'est comme ça que ça a commencé.

Ouais mais ça n'explique pas pourquoi il continue d'aller la voir. Elle, elle se sent seule, il l'a compris. Il ne sait pas vraiment ce qui lui est arrivé mais clairement, elle ne fait plus confiance à personne, à part Diana peut-être. Ils ne parlent jamais de leur vie, ils se contentent de discuter littérature et cinéma. Elle passe parfois au salon pendant sa pause déjeuner et ils partagent un sandwich. Elle ne regarde jamais les photos accrochées au mur, elle ne s'intéresse à rien concernant Jamie, elle ne sait même pas où il vit. Cette relation, parce que c'est une relation, faute de terme plus approprié, cette relation est aussi libératrice que ridicule. Ça ne mènera nulle part et c'est pour ça que Jamie apprécie autant. Il ne veut plus, il ne peut plus s'engager avec qui que ce soit après Chuck, ce serait trop douloureux.

Et puis, faut l'avouer, s'envoyer en l'air avec Freddie, c'est particulièrement sympathique.

Il trace sur son dos nu des formes sans queue ni tête, en écoutant sa respiration. D'ici peu de temps, il faudra qu'il rentre voir Chuck et Ollie. Charlotte et Oliver, ses piliers dont Freddie ignore l'existence. Ça le dérange mais il ignore comment lui en parler et puis, bon, que pourrait-il lui dire ? Au fait, j'ai un fils et je vis encore avec sa mère ? Moyen comme confidence sur l'oreiller. C'est pas leur genre de toute manière, Freddie préfère citer Byron et parler politique plutôt. Il se redresse sur un coupe et avise le radio-réveil sur la table de nuit. Le truc est un brin tordu, elle l'a certainement martelé de coups plus d'une fois. Il l'imagine bien s'en prendre au pauvre appareil, au pied du lit, les yeux bouffis de sommeil et les cheveux en pétard. L'image le fait sourire mais l'heure le rembrunit. Bientôt, il faut bientôt qu'il parte. Ses yeux tombent sur les mots qu'il a inscrit sur sa peau. Never a victim, forever a fighter. Il n'a jamais osé demander pourquoi et peut-être que ce sont les réminiscences de son orgasme qui lui donnent des ailes mais il s'entend dire : « tu ne m'as pas expliqué pourquoi tu voulais ces mots-là précisément » Sa main droite remonte le long de sa colonne vertébrale et s'attardent sur les mots qu'il a tracé. C'est con mais il meurt d'envie de savoir. Ce sera au moins un mystère de résolu dans l'affaire Freddie Morris.

"no control"
ft. freddie ★ crédit@tumblr.

Elle est belle et Jamie est un abruti, il se fait avoir à chaque fois, avec tout le monde. Pas de la même manière, c'est vrai parce qu'il ne couche pas avec chaque personne qui lui tape dans l’œil heureusement mais Freddie a un truc et il tombe dans le panneau à chaque fois. Elle sourit, elle parle de Jonathan Swift et de Samuel Johnson, ses yeux s'éclairent et il en est réduit à la regarder, captivé. Un imbécile, Jamie est un imbécile. Elle a toujours la main dans cette relation, elle décide où et quand. C'est peut-être parce qu'elle est plus âgée, parce qu'il la considère comme une femme accomplie. Elle dit des fois qu'elle se sert de lui et qu'elle s'en veut, elle essaye de lui faire peur, il le sait. Quoi qu'elle en dise, il la connaît et il a compris comment elle fonctionne. Clairement elle a peur qu'il s'attache et quelque part, Jamie trouve ça drôle. Il aurait pu tomber amoureux d'elle si ils s'étaient rencontrés plus tôt mais plus tôt voulait dire à l'époque où il était dingue de Chuck et à ce moment-là il était incapable de regarder qui que ce soit d'autre.

Elle se tourne vers lui en répliquant, elle le regarde enfin et elle réplique vertement, comme toujours. A croire que Freddie est toujours sur la défensive. Ça le fait marrer généralement parce qu'il n'attend rien d'elle, il ne cherche pas à la pousser dans ses retranchements mais elle a peur. Elle a l'air d'avoir peur qu'il dise un truc sérieux ou qu'il verse dans le romantique. Y'a rien de romantique dans ce qu'ils font, ils se soulagent mutuellement c'est tout et il commence à en avoir un peu ras-le-bol qu'elle l'envoie chier chaque fois qu'il ouvre la bouche après l'avoir sautée. Il soupire profondément avant de s'asseoir, sans la lâcher des yeux. « Tu veux vraiment savoir ? » qu'il demande, puis sans attendre de réponse, parce qu'il sait qu'elle pourrait très bien revenir sur ce qu'elle a dit, il continue, poignet gauche levé : « celui-là, c'est un de mes premiers. Je l'ai fait quand j'ai commencé à m'accepter, quand j'ai compris que je ne pourrais pas me forcer à être quelqu'un d'autre » Il se souvient encore de celui-là, il se souvient de tous bien sûr, mais celui-ci a une signification particulière. C'est Debby qui lui a fait et elle en est très fière. Lui aussi d'ailleurs. Il désigne ensuite les deux hirondelles sur son torse. « Celui-là, enfin ceux-là, je les ai fait après la naissance de mon fils, pour Chuck et moi, avec la rose aussi » Il ne lui a jamais parlé de Chuck, ni même d'Ollie. C'est sa vie privée et Freddie n'en fait pas partie. C'est un peu tard pour y penser maintenant qu'il l'a dit. Tant pis.